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Le 23 mars dernier, le maire de Paris, Mme Hidalgo a instrumentalisé la démocratie directe pour la disqualifier d’une façon plus claire et plus efficace que n’aurait jamais pu le rêver toute une classe politique qui refuse, obstinément, d’organiser le moindre referendum sur quelque sujet que ce soit. Toute à sa folie monomaniaque de persécution des automobilistes, elle a, en effet, organisé ce qu’elle appelle “consultation citoyenne” et qui en est, en réalité, tout le contraire. Plusieurs ingrédients pour une recette de sabotage en bonne et due forme.

Premier ingrédient, l’occultation. À l’exception de ceux qui suivent au jour le jour l’actualité, c’est-à-dire les lubies d’Anne Hidalgo, aucun Parisien ne sut avant le jeudi ou le vendredi précédent qu’allait leur être posée la question : « Pour ou contre végétaliser et rendre piétonnes 500 nouvelles rues dans Paris, réparties dans tous les quartiers ? ». Quelques panneaux, amplement destinés d’ordinaire à vanter les actions de la mairie en faveur de telle ou telle toute petite minorité agissante ou pour célébrer quelque début ou fin de ramadan, annonçaient effectivement cette consultation deux ou trois jours avant. Faute d’information, on élimine donc d’emblée la quasi-totalité des électeurs d’autant que toute procuration était interdite. Ce qui n’aurait, de toute façon, rien changé parce que ceux qui avaient programmé un week-end hors de Paris, n’auraient jamais eu le temps d’en fournir une s’ils avaient été informés par les affiches placardées uniquement au milieu de la semaine.

Deuxième ingrédient, l’absence de bureaux de vote. Sur toute la ville, étaient déployés en tout et pour tout deux-cent dix-huit bureaux de vote, mais en réalité dans trente-quatre endroits différents. C’est-à-dire, un ou deux lieux de vote par arrondissement. Il fallait donc, pour peu qu’on fût informé, aller se renseigner sur le site internet de la ville de Paris pour savoir où. Excellente façon d’exclure toutes les personnes réfractaires à l’informatique, notamment les plus âgées qui sont, traditionnellement, celles qui votent le plus. On en arrive donc, pour 1,4 million d’électeurs inscrits à un bureau de vote pour 6 500 et un lieu de vote pour 41 000 électeurs potentiels. Une telle organisation revient à organiser une élection présidentielle dans un seul bureau de vote pour une petite ville de 10 000 habitants. Si la participation avait seulement été de 50%, il eût fallu faire voter chaque Parisien toutes les dix secondes.

Troisième ingrédient, le bourrage d’urnes. Le corps électoral élargi par décision arbitraire de Mme Hidalgo aux jeunes gens de 16 à 18 ans, dépassait théoriquement les 6 500 électeurs par bureau. Mais de combien ? Nul n’en sait rien puisque les moins de 18 ans n’étant pas inscrits sur les listes électorales, on les laissait voter sans savoir s’ils étaient de futurs électeurs parisiens ou des individus rameutés de toutes parts par ceux qui possédaient les informations nécessaires puisqu’ils sont les organisateurs du scrutin : les 55 000 fonctionnaires de la ville de Paris.

Quatrième ingrédient, poser une question bidon. Les électeurs du 23 mars ont certes, approuvé le projet de végétaliser et piétonniser 500 rues mais lesquelles ? Mme Hidalgo organisera un colloque avec elle-même pour les désigner. L’électeur n’aura rien à voir là-dedans. Les Parisiens ont donc un aperçu de ce que pourrait être une prochaine élection présidentielle qui servirait, par exemple, à transformer l’essai marqué en Roumanie en décembre dernier par l’annulation d’un premier tour de présidentielle dont le résultat n’était pas conforme aux souhaits de ses organisateurs. Au lieu d’élire un président de la République, on demandera désormais, « souhaitez-vous qu’un nouveau président de la République succède à Emmanuel Macron ? » Il ne devrait y avoir qu’une toute petite minorité de non.

Et le résultat est là : 56 000 électeurs, pratiquement à l’unité près le nombre de fonctionnaires de la ville de Paris, ont voté. Les deux tiers d’entre eux ont approuvé cette question qui n’est qu’un feu vert donné à la municipalité pour saboter encore davantage qu’il ne l’est, un plan de circulation devenu ubuesque alors que 97% des Parisiens n’y ont pris aucune part. Et on en arrive au cinquième ingrédient du discrédit infligé à la démocratie directe : la validation d’un scrutin sans qu’un quorum aussi modeste soit-il ne soit exigé.